Septembre 2003 

 

Alex : Quels ages avez-vous, quels emplois vous permettent de subsister ?

Michaël : Moi j’ai 29 ans, je suis en train de finir une thèse de Doctorat en physique. Pareil pour Thierry (Guitare, 27 ans). David (Batterie, 27 ans) poursuit le même genre d’activité, mais en mathématique, tandis que Mathias (Basse, 28 ans) est libraire.

2/ Comment s’est formé le groupe ? Qu’est-ce qui a fait la différence entre le groupe amateur et ce que vous êtes ?

On s’est formé en 1996. En fait, David est mon frère et c’est un ami d’enfance de Thierry. Notre bassiste de l’époque était le frère de Thierry. Il nous a quitté autour de 2000, et c’est à ce moment là que Mathias nous est arrivé dans la gueule. Le fait que l’on sorte un peu de notre local est dû à notre longévité (7 ans déjà !) et parce qu’on a établi quelques contacts à gauche à droite (d’abord à Genève et en Suisse romande, et maintenant surtout en France). Mais bon cela dit, en 7 ans, certains groupes ont fait beaucoup beaucoup plus de chemin que nous, mais il faut dire qu’on a jamais cherché à sauter des étapes ou forcer des portes ou quoi que ce soit de ce genre (c’est peut-être pour ça qu’on est encore pratiquement inconnu ! !)…

3/ Quel est la signification de ce nom Impure Wilhelmina (bien que ça vous semble difficile de l’expliquer) ?  Est-elle cette personne dont parle le titre Answer ?

Wilhelmina est un prénom féminin germanique, pour le reste, chacun interprète cela comme il le veut, pareil pour les textes. « Answer » ne parle pas de Wilhelmina, bien que je comprenne que tu ais fait le rapprochement, puisque je parle aussi de musique dans ce texte.  Par rapport à ce nom de groupe, j’ai remarqué au fil des ans que les gens avec qui j’ai des contacts l’orthographient de mieux en mieux. Un bond à même été franchi depuis la sortie de « I can’t believe I was born in July » ; maintenant pratiquement tout le monde (dont toi) utilise la bonne orthographe.

4/ Je crois savoir que tu accordes beaucoup d’importance au texte lorsque tu écoutes un groupe, quels groupes satisfont ton attente ?

J’ai toujours apprécié les textes sombres, désespérés et nihilistes. Je ne sais pas, par exemple Eyehategod, Bloodlet, Today is the day, ou encore Slipknot, Nine Inch Nails, The Cure, pfffff…y’en a tellement! Sinon, je ne rechigne pas un brin d’humour et des trucs plus décalés, ou parfois des textes plus épiques ou romantiques, il faut de tout !

5/ Tes textes sont assez spéciaux, sombres, pourquoi ce style de textes ?

Il n’y a rien de prémédité. Je ne sais jamais à l’avance de quoi je vais parler dans mes textes. Pour l’album, à part quelques passages, je les ai écrits 2-3 semaines avant d’entrer en studio, alors que la musique était en place depuis longtemps (…à part quelques passages). On peut donc pratiquement dire que tout a été écrit en un seul bloc. J’avais la volonté d’écrire sur un ton très très noir, mais c’était juste l’intention du moment, ça ne correspond pas vraiment à ma personnalité (le néant n’a pas de couleur), mais putain le noir c’est tellement beau !  

6/ Quelles sont les émotions que tu souhaites faire passer à travers vos compositions ?

Un sentiment de plénitude, de réconfort. C’est ce que je ressens quand j’écoute de la bonne musique. Mais je me demande parfois si notre style, avec tous ces changements de cap, est adapté pour laisser grandir ce type d’émotion le long d’un morceau ou d’un album…a méditer…

7/ Votre musique est très sombre, votre prestation scénique très forte. Etes-vous satisfaits de ce que vous donnez à votre public ou vous avez l’impression d’avoir encore du chemin à faire ?

A Paris, on a joué très fort, mais c’est parce qu’on avait fait deux dates dans des bars juste avant, des lieux où tu as tendance à limiter les décibels. Donc on est arrivé dans ce squat et on s’est dit c’est le moment d’envoyer la purée ! En fait, ce qu’on donne au public (et à nous-mêmes) est très variable d’un concert à l’autre, mais je crois que c’est vrai pour tous les groupes. Cependant, on a joué avec ISIS en avril, et je peux donc t’affirmer qu’on a encore du chemin à faire…

8/Tu dis dans No Brain No Headache que certaines compositions peuvent rester longtemps sans textes. Est-ce que tu penses que c’est du à une difficulté d’extérioriser ces émotions ?

Oui, il y a de ça. C’est aussi dû au fait que j’ai du mal à improviser en Anglais. Si les textes étaient en français, il serait vraisemblable d’imaginer que je me pointe à la répète et que je ponde un couplet en deux minutes par exemple. Et puis comme la plupart du temps je ne fais que brailler, de toute façon on ne comprend rien, donc la nécessité d’un texte ne s’impose qu’au moment de l’enregistrement.

9/ Quels groupes t’inspirent le plus ?

Ah là…difficile question…il me semble que nous n’avons jamais chercher à copier le son de tel ou tel groupe…de toute façon, ce genre de démarche est pratiquement toujours lié à la mode du moment, donc…de plus, je dois bien admettre que je n’ai pas vraiment une oreille « sonore », et j’écoute avec le même plaisirs des groupes qui ont des « sons » très variés…tant qu’il y a des notes…

10/ Vous avez une facilité à passer d’un plan bruyant, chaotique à un plan plus calme et atmosphérique. Est-ce que cette contradiction se retrouve dans vos propres personnalités ?

Demande à mon entourage…en tous cas, je ne me définit pas comme quelqu’un de très constant, sans être un incurable schizophrène… Le fait que notre musique est variée vient plutôt de nos goûts assez larges…

11/ Est-ce que la musique est le seul support artistique qui t’inspire ?

Non. Films, Tableaux, Livres, ou tout simplement le quotidien. Le support musical, c’est juste la forme.

12/ Est-ce que tu crois que ce rapport passionnel à la musique ne concerne qu’une certaine scène ?

Je ne crois pas. Il y a énormément d’artistes qui arrivent à concilier passion et ventes conséquentes, alors que d’autres, au contraire, font non seulement de la daube mais en plus n’arrivent pas à la vendre. Mais il est vrais que la plupart des musiciens se trouvent dans notre cas : une très grande passion et peu de ventes. 

13/ Écoutez-vous des styles de musique qui sont aux antipodes du hardcore ? Par exemple classique ou reggae ?

Oui. Entre nous quatre, on doit ratisser sur tous les styles de musiques, classique, blues, jazz, electro, etc… D’ailleurs je me rends compte qu’en fait on n’écoute pas tellement de hardcore, on n’a jamais été influencé par des trucs « old school » par exemple. Personnellement j’ai toujours été dans le metal, sinon j’apprécie beaucoup le rock plus classique, la pop…

14/ Est-ce qu’il y a une place pour les squats, les collectifs punks dans la société Suisse ?

C’est comme partout je pense; un squat peut durer plusieurs mois voire plusieurs années, avec par exemple un lieu pour faire des concerts, et un jour la police débarque et met tout le monde dehors et c’est fini. Ces dernières années on a vu à Genève une diminution du nombre de squats…c’est de moins en moins « toléré ».

15/ Est-ce que votre groupe est perçu de la même façon par le public Suisse et Français ?

Je n’en sais rien. Quand on joue en Suisse, je vois pleins de têtes connues, ça veut dire que les gens se sont « habitués » à nous, il y a moins d’effet de surprise. Tandis que j’ai l’impression que en France avec le nouvel album plein de gens sont en train de nous découvrir…mais un jour ils seront lassés eux aussi !

16/ Êtes-vous déconnectés lorsque vous donnez un concert ? A quoi pensez-vous ?

Non, nous ne sommes pas vraiment déconnectés. Je crois que à ce que l’on pense le plus, c’est à la réaction du public. Si on le sens chaleureux, ça va, si on le sent un peu distant, c’est très dur… Et ça dépend aussi du morceaux qu’on est en train de jouer ; certains sont très planant et on peut se laisser aller à fermer les yeux ou regarder les filles du premier rang, d’autres sont plus techniques et nerveux, et ça demande une bonne dose de concentration, et on est plus tendus…

17/ On vous dit « timides », est-ce une qualité ou un défaut pour avancer musicalement ?

La timidité est un poison qui t’empêche d’envisager sereinement n’importe quelle situation dans la vie, à mon avis il n’y a rien de bon la dedans.

18/ Si tel était le cas, est-ce que ça te plairait de faire la B.O du prochain Tim Burton comme l’a  dit une chronique piochée sur le net ?

Ouais, à mon avis y’a quand même une distance entre l’univers de Tim Burton et le nôtre. Sinon, de manière plus générale, faire un travail sur commande comme par exemple la BO d’un film, ça pourrait être une expérience intéressante, on n’a jamais fait quelque chose comme ça, et je ne sais pas si ça pourrait donner un résultat probant…

19/ Sur un autre site, j’ai lu :  « Impure Wilhelmina (violence / malaise / beauté) », est-ce que ces mots te semblent juste ?

Oui, ça j’aime bien. Ca change du sempiternel « metal-hardcore sombre et mélancolique ». Ca rejoint en fait ta question sur nos influences extra-musicales, si quelqu’un arrive à décrire ce que l’on fait avec des mots non musicaux, c’est comme faire ressortir du cadre musical ce que l’on avait initialement puisé ailleurs…

20/ J’ai vu que votre album était en vente sur une distro japonaise, est-ce que ça vous fait plaisir de savoir que votre musique s’importe si loin ?

Non, on trouve ça complètement nul ! On fait de la musique juste pour nos potes qui viennent boire des bières au local pendant les répètes…c’est quoi le nom de la distro 

21/ On parle beaucoup de vous dans les fanzines mais je n’ai trouvé qu’une interview (sur No brain no headache), avez-vous des interviews en cours ?

Oui, c’est la troisième de suite à laquelle je réponds. La première c’était pour un nouveau fanzine de Poitiers qui s’appelle Elvice et versa, et dont le premier numéro sortira en septembre. La seconde, c’est pour la sympathique asso l’écho dans la plaine d’Amiens, ils nous ont fait jouer avec les Weeping Minds of Silence en juin, merci à eux.  L’interview est en ligne sur echodanslaplaine.free.fr.

22/ Alors comment t’habilles-tu sur scène ? … J’ai cru comprendre que c’était le genre de questions qui t’exaspérait. Est-ce qu’il y a des causes qui vous tiennent à cœur ? Est-ce que certains d’entre vous s’investissent dans des assos plus politisés ?

Tu as lu ça dans l’interview sur No brain ? C’est juste que je suis persuadé que dans mon entourage y’a des gens qui pensent qu’on s’habille comme les mecs de Kiss…tu as dû voir à Paris que ce n’était pas le cas, d’ailleurs nos tenues vestimentaires scéniques ne sont pas brillantes vu que ce sont nos habits normaux, et comme on est des gens très moyens… Pour répondre à ta deuxième question, aucun de nous n’est dans une asso politisée…personnellement je ne suis pas Suisse, donc je n’ai jamais pu voter et forcément la politique est pour moi un truc assez lointain, malheureusement…

23/ Tu n'es pas suisse ?
Non, je suis autrichien.

24/ Une dernière chose à dire ?

Euh…oui. On a recommencé à composer des nouveaux morceaux, et cet automne-hiver on va faire des dates en France avec Overmars, les dates bientôt sur notre site…